Abigaël s'était toujours demandé quand viendrait le moment des représailles et des désillusions quant à sa relation avec Cassiopée. Il s'était toujours imaginé dans une bulle où les seules blessures qu'ils pouvaient recevoir ne viendraient que d'eux-même, où rien ne pourrait les atteindre parce qu'il portait le beau nom de Velrose, nom qui suffirait à faire fuir ses ennemis. Il se trompait, du début à la fin, et la chute n'en avait été que plus amère. Lorsqu'il avait appris la nouvelle, il avait cru devenir fou, et si Maewan ne l'avait retenu, il aurait passé ses nerfs sur tous les pro-mangemorts de l'école, à commencer par Lestrange. D'abord incrédule puis enfin complètement enragé, il n'avait attendu nulle autorisation pour quitter son cours. Cela ressemblait à un mauvais déjà-vu, l'un de ses proches à l'hôpital, d'abord Lukeither, ensuite Mae puis aujourd'hui Cassiopée. Or il savait bien que tout ça était de sa faute, que si sa belle avait toujours été discrète et avait toujours cherché à brouiller les pistes, lui n'avait cessé de se vanter être son petit-ami et de lui promettre amour et protection. Abigaël avait eu du mal à réagir tout le long du chemin, escorté par l'un de ses professeurs jusqu'à ce qu'il put transplaner jusqu'à Ste Mangouste. Il fut pris de premières nausées. La dernière fois qu'il était venu ici, était peu avant la rentrée en 1974 quand, prise de crises de nerfs violentes, il avait amené sa mère en ces lieux pendant qu'Alix était envoyé chez leurs grands-parents. Il demanda son chemin, ou plutôt la chambre de Cassiopée, en se demandant pourquoi on l'avait prévenu lui et pas ses parents. Dans tous les cas, il était tellement secoué que de voir débarquer les parents de la Serpentard l'aurait rendu aussi fou que l'heure précédente, pour lui, ils ne méritaient plus de l'appeler leur fille quand ils avaient laissé une chose pareille se produire. Même s'il savait qu'il n'aurait certes pas fait le poids face à monsieur Goldstein, il se serait démené pour l'éjecter lui et sa tordue de femme hors de la chambre.
Arrivé sur place, il éclata en sanglots en voyant l'état de la brune, qui était pire que ce qu'il pouvait imaginer. Il resta là, bien des heures, à pleurer en silence, sa main tenant la sienne alors qu'elle ne pouvait le voir ni l'entendre. Il se demanda qui était assez tordu, même chez les Mangemorts, pour lui infliger tant de souffrances. Car si ce n'étaient les Lestrange eux-même qui avaient commandité tout ça, ce ne pouvaient qu'être les Mangemorts. Sa haine envers eux ne fit que grandir encore si c'était possible. Depuis tout petit il avait grandi dans l'animosité envers les Lestrange, mais il ne les avait jamais autant haïs. Et que Rodolphus soit au courant ou pas, Abigaël ne savait comment il pourrait croiser son chemin à Poudlard sans risquer de le tuer ou de l'amocher tout autant que sa belle pour l'envoyer en kit à ses parents. Pire que ça, sa confiance en son nom et sa famille avaient faibli. Ainsi, s'appeler Velrose ne signifiait plus rien ? Les choses auraient été plus simples s'il avait été un sang-pur. Il aurait pu demander la main de Cassiopée directement auprès de son père. Ils n'auraient pas eu à se cacher, il aurait pu narguer Lestrange avec fierté. Mais il demeurait un pauvre sang-mêlé. Soudain, il fut comme pris de colère envers son père, pour la première fois de sa vie il lui en voulait d'être tombé amoureux d'une moldue. Plus tard, il s'en voulut.
Il s'arrangea pour passer tout le reste de la semaine, le soir après les cours, à l'hôpital, pour veiller sur elle. Apparemment, elle n'avait pas reçu d'autres visites, si ce n'est Lukeither ou Maewan. Il se sentit d'autant plus honteux envers Blondie que malgré tout ce qu'il avait pu lui faire pendant un mois, elle venait s'inquiéter de l'état de Cassie et l'encourager lui à tenir bon. Le Japonais avait été odieux et idiot avec tout le monde et ce n'est que maintenant qu'il le réalisait. Mais plus que jamais il ne devait pas se laisser aller, car une fois sortie de là, elle aurait besoin de lui. Chaque soir il apportait des fleurs fraîches, les fleurs préférées de Cassie, des roses rouges, il la faisait manger quand elle était éveillée et gardait le sourire devant elle pour qu'elle ne le voit pas affligé. Le samedi, il alla à l'accueil remplir des papiers et faire promettre aux médecins de ne pas laisser les parents de Cassie l'emmener avant lui. Il ne savait pas vraiment à quelle sorte d'autorité il pouvait prétendre, mais il insista tellement qu'il finit par penser avoir gain de cause. Les vacances d'Avril pointaient déjà le bout de leur nez et Abigaël avait déjà tout calculé.
Le dimanche matin, très tôt, Alecia se présenta chez lui et tous deux, protégèrent la maison avec des sortilèges complexes que la blonde avait sorti d'un vieux grimoire. Pour le moment, plus personne ne pouvait transplaner directement dans la maison, qui était protégées contre sortilèges et intrusions. Lukeither avait jugé le tout insuffisant et avait proposé une magie bien plus ancienne et compliquée. Elle avait promis de revenir en semaine, lorsque Cassie aurait été installée. Peu après, il vint chez ses grands-parents pour leur dire qu'il hébergerait sa précieuse amie tout le temps des vacances et même plus tard et qu'ainsi, il se mettait à dos ses parents. Astaroth n'eut aucune réaction, il lisait la gazette du sorcier et pinçait les lèvres comme à son habitude, le regard dur et sérieux. Madilva cependant, fut plus choquée, et marmonna qu'elle avait engendré de sacrés fauteurs de trouble. Leur elfe de maison, passa au chemin de traverse acheter des vêtements pour la brune. Abigaël se voyait mal aller récupérer la valise de la belle à Poudlard sans faire de carnage au passage. Il repartit avec les vêtements, et une fois rentré, nettoya un grand coup le manoir pour s'occuper la pensée.
Il n'avait pas encore remis son cadeau d'anniversaire à Cassie qui pourtant été passé depuis plus de dix jours, et pour cause, il n'était pas fini. C'était un cadeau fait sur-mesure, spécialement pour elle, en une pièce unique, qui lui avait coûté très cher, mais il ne savait plus comment ni quand lui donner une fois fini et acheminé jusqu'au manoir. Le soir, il vint récupérer Cassiopée à Ste Mangouste, sans chercher à savoir si on allait la lui réclamer. Le premier qui oserait venir l'arracher à ses bras aurait bien fait de creuser sa tombe au préalable. Il avait l'impression qu'elle n'était plus qu'une carcasse vide. Il avait beau lui parler, elle ne répondait pas, pis, parfois elle ne réagissait pas et il s'en sentait démuni. Une fois rentrés, il l'installa dans sa chambre, bien qu'il y en avait d'autres, et passa la nuit à ses côtés, la gardant dans ses bras, en espérant qu'elle trouva ça plus rassurant que d'être entourée de médecins.
Le matin suivant, il se leva un peu plus tôt pour prendre sa douche. D'habitude, il passait ses journées à manger, mais là en se levant, il n'avait aucun appétit. Avoir Cassiopée chez lui impliquer de s'en occuper du matin au soir, avec tout ce que ça impliquait, et il était prêt à tout faire pour qu'elle se sente mieux. Il alla la retrouver, et la réveilla avec de petites caresses, dans ses cheveux, contre sa joue, le plus tendrement possible. Lorsqu'il la voyait ainsi, il ne cessait de se demander jusqu'où son agresseur était allé et ça le dégoûtait au point qu'il avait peur de la toucher sans qu'elle ne sursaute en se demandant si elle ne revivait pas encore ce cauchemar. Personne ne savait ce qui s'était réellement passé, Abigaël lui brûlait de savoir, mais ça ne se ferait pas par la force. La brune avait besoin de se reposer. Quand elle fut réveillée, il la prit dans ses bras et l'amena jusqu'à la salle de bains, où il la déshabilla.
Il avait déjà vu sa peau nue, en Décembre, collée à la sienne, dans la plus stricte intimité, mais en temps normal il aurait tout de même été gêné. Or, ici, la gêne avait laissé place à la stupeur. Il l'installa dans la baignoire, prit le pommeau de douche très moldu et fit couler l'eau en bord de baignoire pour en jauger la température. Une fois fait, il commença à mouiller ce corps qu'il avait tant désiré et qui aujourd'hui, lui faisait peur à voir. Son désir de vengeance n'en fut que plus grandi. Il promena délicatement ses doigts sur les genoux et les épaules de la brune, sentant à chaque passage sur sa peau mouillée, les stigmates et les creux des cicatrices qui mordaient son corps. Il glissa la main dans ses cheveux, les ramena en arrière et glissa dans son dos froid, en espérant que ses gestes répétés et l'eau chaude la réchauffe suffisamment. Il la trouva très docile, quoi qu'ailleurs, et décida de garder le silence tout le temps qu'il l'aidait à prendre son bain. Dans un couple normal, la chose eut été romantique, pour eux c'était tout différent. Mais il ne fallait pas se méprendre. S'il avait pu la faire sienne, là de suite, malgré toutes ses blessures, il l'aurait fait. Car même rendue blême par tant de blessures, Cassiopée n'en demeurait pas moins magnifique aux yeux du Japonais.
Il laissa courir l'eau de très longues minutes, répéta les caresses, les petites attentions rassurantes, comme pour la remettre en confiance. « Ca va, tu n'as pas froid ? » finit-il par dire en plongeant les yeux dans les siens. Il caressa de nouveau ses cheveux, coupa l'eau pour les lui laver. « Ne t'en fais pas. Ça guérira très vite, même comme ça, tu restes infiniment belle à mes yeux. » Il déposa un baiser contre sa tempe. « Ne t'en fais pas. Je vais prendre soin de toi. »
I'm not crazy hell no I'm not loony, I'm not insane, take a second, I heard it, I know it. Whispers say my name, calling for me. ⊹ L'enfer.
Simple euphémisme, la brune avait l'impression d'être totalement retournée. Elle avait atterrit à St-Mangouste sans trop se souvenir comment. Elle se souvenait de comment elle s'était échappée, comment David et elle s'étaient traînés jusque Poudlard, mais après ça les choses étaient beaucoup plus floues. Toutefois, elle se souvenait s'être débattue dans son lit quand les médecins avaient voulus lui faire boire leur fichue potion. Elle connaissait bien la potion de paix, sa mère avait assommé son frère avec ça quand il avait du quitter Jaz', le pauvre avait été dévasté et Sarah-Ann n'avait pas trouvé mieux que de droguer son fils pour ne pas qu'il vienne étaler ses problèmes aux yeux de tous. Déjà là, la mère Goldstein avait démontré à quel point le bien-être de ses enfants lui tenait à cœur. Elle ne voulait pas se laisser droguer, malgré la douleur qui semblait omniprésente. La brune ne voulait pas être vulnérable à nouveau, risquer de baisser ça garde. Mais le nombre à eu raison de sa volonté et la jeune femme, affaiblie, se vit forcé de boire cette potion, la plongeant ainsi dans un sommeil sans rêve. Pendant trois jours, les médecins ne l'ont pas vraiment laissé l'occasion de se réveiller, lui redonnant de la potion à chaque fois. Cependant, dans ses rares moments de conscience, elle put voir son frère à son chevet. Pauvre Iwan, il avait l'air tellement désemparé. Elle aurait voulu lui dire de ne pas s'inquiéter, que tout allait s'arranger maintenant. Peu importe que ce soit un mensonge ou non, elle voulait simplement gommer cette expression sur son visage. Elle n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche, simplement de poser sa main contre la sienne avant de replonger dans le néant.
Au bout de trois jours, les médecins avaient décidés qu'elle pouvait doucement revenir à la réalité et quelle réalité. Son corps était encore douloureux. Sa respiration encore difficile, mais ce n'était pas ça le plus dur. La douleur physique ça passait, mais le chaos qui régnait dans son esprit était insupportable. Elle ne savait plus où elle en était et les mots du lycaon tournaient encore dans son esprit. Étrangement, la personne qui retourna le plus le couteau dans la plaie fut Abigaël. La première fois qu'elle le vit, elle avait à peine ouvert les yeux et lui donnait l'air d'être là depuis un moment. Un sentiment de culpabilité l'envahit directement. Heureusement pour elle, son attention était occupée ailleurs et il ne remarqua pas que sa belle s'était réveillée. D'ailleurs, elle s'empressa de refermer les yeux. Elle ne se sentait pas le courage d'affronter le japonais, pas encore. Elle s'en voulait tellement, il avait du s'inquiéter à cause d'elle. Tout le monde avait du s'inquiéter de sa faute. Un nœud vint se loger dans sa gorge. Cassie ne pouvait pas affronter le regard d'Abigaël, elle s'en voulait et avait peur qu'il lui arrive quelque chose. Son geôlier lui avait bien fait comprendre ce qu'il risquait si elle s'entêtait à poursuivre leur relation. Elle mettait sa vie au danger à chaque instant qu'il passait avec elle et ça elle ne pouvait pas le supporter. Elle était prête à faire fasse à toute les tortures imaginables pour protéger le poufsouffle, mais l'idée que lui, puisse avoir des problèmes à cause d'elle lui était insupportable.
Cassie avait eu l'idée de demander aux infirmières de ne plus le laisser entrer, peut-être que comme ça il comprendrait que c'était fini entre eux, parce que c'était ça l'unique solution. Elle devait penser à lui avant tout et même si Abigaël aurait été pour elle un soutien important, elle ne voulait pas le mettre en danger. Elle ne voulait mettre personne en danger et elle se demandait si ce n'était pas mieux pour tous qu'elle ne retourne pas à Poudlard. Son idée se renforça quand elle vit Maewan et Alecia. Ils avaient l'air tellement dépités, elle ne devait pas retourner à Poudlard. L'endroit n'était plus sûre et elle ne pouvait protéger personne de là-bas. Comme elle pouvait s'y attendre ses parents n'étaient pas venu la voir. Heureusement, elle soupçonnait Iwan de les avoir menacé d'un scandale s'ils osaient se pointer. C'était bien son genre.
Le jour de sa sortie, Cassiopée avait prit sa décision, elle ne reviendrait pas à Poudlard et elle était sûre que son frère comprendrait ses raisons, d'ailleurs, elle allait devoir lui expliquer ce qui lui était arrivée, ça allait devoir arriver à un moment ou à un autre, c'était inévitable. Depuis qu'elle était à St-Mangouste elle n'avait presque pas ouvert la bouche, Iwan avait été la seule personne à qui elle avait parlé, juste quelques mots. L'anglaise était incapable de parler à qui que ce soit d'autre et surtout pas à Abi. De toute manière ce n'était pas compliqué dès qu'il entrait dans la même pièce qu'elle, sa gorge était tellement nouée qu'elle aurait été incapable de dire quoique ce soit. Quelle ne fit pas sa surprise quand elle découvrit, à la place de son frère, un Abigaël Velrose au visage soucieux. Il lui fit vite comprendre que c'était avec lui qu'elle allait repartir et là, son mutisme lui posa bien des problèmes, elle avait envie de lui dire que ce n'était pas une bonne idée, mais elle n'en avait pas la force et le suivit sans rien dire. Malgré tout ce qu'elle pouvait dire, le contact de son japonais la faisait se sentir mieux et pire à la fois. En sa compagnie tout se mélangeait dans sa tête. Les blessures de son corps lui semblaient moins douloureuses, mais celle de son cœur brûlait d'avantage.
Sa première nuit hors de l'hôpital sorcier fut horrible. Abigaël avait tenu à rester auprès d'elle, mais elle n'avait presque pas réussie à dormir, puisqu'à chaque fois qu'elle fermait les yeux elle revoyait cet affreux cauchemar où Abigaël pleurait devant son fantôme. Les images tournaient encore et encore dans esprit, l'empêchant de trouver un sommeil salvateur. La culpabilité la rongeait et elle était incapable de faire quoique ce soit. Le pire était la proximité, elle qui d'habitude adorait le contact doux et chaud de la peau d'Abigaël avait des nausées quand il s'approchait un peu trop près. C'était tellement frustrant et rageant que ça lui donnait envie de pleurer. Mais pleurer, elle l'avait trop fait et plus aucune larme n'était capable de glisser sur ses joues. Plus rien d'ailleurs n'étaient capable de sortir d'elle, un peu comme si toutes ses émotions avaient abandonnés le navire. La seule qui subsistait c'était le vide, le néant. Quand il vint la réveiller, elle ne put garder pour elle ses sursauts, il avait été doux pourtant, mais elle ne supportait plus le contact avec autrui. Il l'amena jusque la salle de bain et elle n'opposa aucune résistances, elle n'en avait pas la force de toute façon, la lassitude figeant tout ses mouvements. Vu l'état physique dans lequel elle était, jamais elle n'aurait autorisé Abigaël à la voir nue, elle savait que son corps était pleins de cicatrices, la plupart faite par le loup, simple jeu pour lui. Mais sa volonté l'avait quitté et ses vêtements n'étaient plus là avant qu'elle ne s'en rende compte. Elle était ailleurs, bien loin, dans une toute autre prison. La sienne. La plus horrible. Elle était fatiguée, d'une fatigue qu'une nuit de sommeil n'aurait pu soigner. Elle frissonnait sous les caresses d'Abigaël, mais plus d'appréhension qu'autre chose. Toutefois, comme aucun son ne sortait de sa bouche, il pouvait bien prendre ça comme il le voulait. Il s'adressa à elle, la sortant de ses idées noires. Ses mots auraient du la rassurer, la réveiller de cette transe ridicule. Pourtant, ça lui donna la nausée, le genre de crise qui vous retourne l'estomac en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Sa gorge plus serré que jamais. Comment pouvait-elle lui infliger ça. Elle avait envie de pleurer, de hurler, de tout casser et pourtant, elle ne bougea pas, n'ouvrit pas la bouche, elle se contenta de regarder Abigaël avec un regard plus vide que jamais. Elle était prisonnière de son propre corps et ça la bouffait. La seule chose qu'elle pu faire, fut de poser sa tête contre l'épaule d'Abigaël, désolée, mouillant son t-shirt, sans un mot. Elle aurait mieux fait de ne pas revenir.
Elle n'avait fait que poser la tête sur son épaule, ce simple geste, après ses frémissements, qui voulait tout dire. Abigaël s'arrêta un moment de frotter le cuir chevelu de la brune pour reprendre sa respiration en silence. Il se retint de laisser libre court à ce qu'il retenait depuis un moment déjà. Apparemment, il n'y avait qu'Iwan qui avait su lui soutirer quelques mots, le Japonais s'en sentit bien petit. Peut-être qu'elle n'avait pas confiance, peut-être qu'elle ne voulait même plus de lui, et sous ses silences il n'arrivait pas à calculer le moindre indice, la moindre information. Cassiopée s'était fermée à double-tour, même à lui et le pauvre Poufsouffle, avec son cœur trop gros pour le supporter, n'arrivait plus à s'en sortir. Émotionnellement, il était comme une coupe pleine que l'on essayait encore de remplir : tôt ou tard, il finirait par déborder. Comme il se recula pour laver les cheveux de la brune, il attrapa, une fois fini, une serviette et la souleva. Il eut l'impression de soulever une plume, une carcasse qui ne possédait plus rien, à l'intérieur. Sa gorge se noua et il pinça les lèvres en l'enroulant autour de la serviette pour frotter sa peau, et ensuite l'habiller. Le regard de sa belle, autrefois si pétillant, n'était plus qu'un puits sans fond, un néant limpide et blême qui l'immobilisa un moment. Ne pas craquer, pas devant elle, car il devait être fort. Mais ne pas pleurer était-elle vraiment une démonstration de force ? Même les hommes pleurent, pensa-t-il en repensant à son grand-père lorsqu'il avait vu son fils quitter la vie.
Il porta la brune jusque dans la cuisine. Le geste était idiot, puisque ni elle, ni lui, ne mangeraient quoi que ce soit. S'il arrivait à lui faire avaler quelque chose, cela méritait presque qu'on brûle un cierge, comme le font certains moldus. Il ne comprenait pas, et n'avait jamais compris les notions de religions, de dieux, car s'il y en avait eu de bons, jamais une chose pareille ne serait arrivée. Il la déposa sur l'une des chaises, juste contre la table qui servait aussi de plan de travail au milieu de la grande pièce qui avait vu défiler de nombreux plats à n'en plus finir. Sa mère avait réussi à partager avec lui son amour de la cuisine, mais aujourd'hui, bien qu'elle fut autrefois remplie d'une atmosphère familiale et chaleureuse, elle lui paraissait tout aussi vide que son cœur. Il resta bien plusieurs minutes plantés devant l'une des fenêtres donnant sur le jardin, à regarder la fontaine du jardin zen laisser s'écouler son eau dans un rythme très lent. Il avait envie d'y mettre le feu, de raser tout ce qui se trouvait devant lui, le jardin, la cuisine, la maison, le domaine, tout. Tout serait flambé, tout tomberait en cendres, voilà qui lui ferait prendre son pied. Sa maison comme il l'appelait. Où il n'y avait plus aucune famille. Il était tout seul, terriblement tout seul. Et lui qui voulait y construire de nouveaux souvenirs avec la Serpentard avait vu ses plans ruinés par un fou furieux, dont il aurait la peau.
Il aurait leur peau à tous d'ailleurs. Abigaël ne savait pas encore comment, ni par quels moyens, mais il les enterrerait tous, ou mieux, les balancerait dans un fossé naturel pour ne pas se déranger. Ils ne méritaient pas de tombes à proprement parler. Il les tuerait tous. A commencer par les Lestrange. C'était presque allergique, ce nom l'horripilait plus encore que la notion de « mangemort », à croire que c'était vraiment dans son sang, jusqu'au plus profond de ses nerfs, à la racine de ses os. La haine que vouaient les Velrose aux Lestrange grandissait d'années en années, se renforçait avec les générations, sans que le Japonais puisse réellement dire pourquoi. Sauf que cette fois, de l'huile avait été lancée sur le feu.
Comme Cassie ne bougeait pas d'un pouce, elle paraissait même pétrifiée, Abi l'emporta jusque dans le salon pour l'installer sur le canapé, lui ramener une couverture. Il laissa même sa baguette juste sur la table basse, certain que ça la rassurerait. La laisser seule n'était peut-être pas une bonne idée, mais il avait besoin de prendre l'air, de souffler un peu s'il ne voulait pas que ses nerfs lâchent. Surtout que ce ne serait pas vraiment joli à voir. Arrivé devant l'entrée, il se posa sur les marches et sortir un paquet de cigarettes résolument moldues. Mis à part quelques joints d'herbe magique de temps en temps, Abigaël ne fumait pas. Seulement aujourd'hui, ce paquet le lorgnait depuis deux jours et il décida de laisser tomber. Il prit une cigarette et l'alluma du bout de sa baguette, laissant ses épaules retomber, flasques, tandis que la fumée calcinait ses poumons. Il se faisait mal, comme le tabac moldu était terrifiant et empoisonné comparé à l'herbe magique si douce et parfumée. Il s’époumona, toussa, mais il n'en avait que faire, si bien qu'il ne remarqua pas la personne qui se dressait à présent face à lui.
L'ancien des Velrose se tenait droit comme un piqué face à son petit-fils, et ses sourcils froncés lui donnaient cet air dur qu'il avait habituellement. Là, dans sa robe de sorcier impeccablement repassée, il donna l'impression à Abi de se retrouver devant un Auror venu arrêter un criminel. Alastor était toujours ainsi, dur et froid de visage et le japonais ne s'y était jamais réellement habitué, il avait toujours eu du mal avec ce côté plus solennel de la famille, en ça, Abel ressemblait bien au parfait petit Velrose, son abruti de cousin... Le patriarche s'avança vers son petit-fils d'un pas lent et sûr. « Je ne savais pas que tu t'étais mis à fumer ces cochonneries. » dit-il d'une voix rauque. Abigaël releva la tête et haussa les épaules, tout en envoyant la fumée bien haut. Inutile de dire qu'il en avait besoin. Il ne prit cependant pas la même de la terminer et l'écrasa du talon après s'être relevé. Son grand-père sembla lire dans ses pensées puisqu'il ajouta : « Je suis passé voir ton père ce matin, et je me suis dis que toi et moi avions besoin de discuter un peu. Je voulais aussi voir cette jeune fille que tu protèges comme un fou allié. ». A ces mots, le japonais grimaça et fit barrage de toute sa hauteur devant la porte. « Elle se repose et il fait bon, on peut discuter dehors. » lâcha-t-il sur un ton un peu bourru.
Alastor sembla s'en amuser puisqu'un sourire, bien rare, vint déformer sa mâchoire. « J'ai discuté avec ta grand-mère ce matin, avec ton oncle, et ton cousin aussi. ». Là-dessus, Abigaël eut un nouveau rictus agacé. Réunir la famille proche, voilà le genre de choses qui lui faisait peur. S'étaient-ils mis d'accord pour l'empêcher de voir Cassiopée, et protéger avant tout la réputation de la famille ? Si c'était ainsi, alors le Poufsouffle abandonnerait bien volontiers son héritage et son nom pour rester avec la femme de sa vie. Pourtant... « Nous avons décidé de prendre la petite Goldstein sous notre aile. Elle sera sous la protection de la famille dorénavant. ». A ça, Abi haussa un sourcil, incrédule. « Tu es sérieux ? Tu sais ce que ça veut dire au moins ? Ça m'étonnerait qu'Abel se soit réjoui de passer d'une guerre froide à un affrontement direct avec les Lestrange, lui qui est si... Enfin, c'est Abel, quoi. ».
Alastor vint s'asseoir à son tour sur les marches en invitant son petit-fils à en faire de même. Même assis là, vulgairement sur la pierre tiède, il imposait le respect. « Ce que tu dois savoir de notre famille, c'est que nous sommes étroitement liés aux nobles familles de sang-purs, Black et Lestrange. Les jeunes Sirius et Regulus Black te sont cousins éloignés par ma mère, qui était une Xaxley et dont la sœur a épousé Acturus Black, premier du nom. » Jusqu'ici, Abigaël avait suivi mais il eut comme un petit choc, presque heureux. Sirius et lui étaient cousins, pas si proches, mais cousins tout de même. Bon, il ne put se réjouir de partager ces liens familiaux avec Regulus, mais il s'en contenterait. Il ne préféra pas couper son grand-père dans son discours, mais il sentait le pire arriver. « Comme tu le sais, j'ai épousé une Prewett, qui sont étroitement liés aux Weasley. Arthur Weasley est d'ailleurs un très bon garçon. Mais passons. Ma grand-mère, elle, était une Lestrange. ».
Le japonais eut soudain la nausée. Il avait du sang de Lestrange. La partie de trop dans la famille. « Tu es sérieux là ? Tu veux me faire croire que la famille que l'on déteste le plus depuis des siècles s'est mêlée à la nôtre ? » cracha le Poufsouffle, conscient que son discours rappelait celui des sang-purs alliés à Voldemort. « Pas depuis des siècles. » rectifia Alastor, toujours très calme. « Depuis moi, en vérité. Comme l'alliance de notre famille avec les Black, à un certain degré, était profitable aux Velrose, ma grand-mère voulait me faire épouser une Lestrange ou une Black, par intérêts et aussi parce que sa réputation en dépendait. Elle-même Lestrange, elle avait assuré que, d'une façon ou d'une autre, que ce soit par ses fils ou ses petits-fils, elle souderait davantage nos liens. Sauf que mon père a décidé en son heure de se rapprocher des Black. Les liens avec les Lestrange reposaient donc sur moi. Mon père était déjà malade à l'époque où je suis devenu majeur, et il était évident que je deviendrais le chef de famille bien assez tôt. Cette méchante femme en a profité. Elle avait déjà pourri la vie de son fils, autant en remettre une couche. ».
Abigaël demeurait muet. C'était bien la première fois qu'il entendait parler son grand-père de toutes ces choses. Il ne s'était jamais réellement intéressé aux histoires de famille, ni à la généalogie, après tout seule sa famille proche l'importait, mais maintenant que sa curiosité avait été piquée à vif, il ne voulait pas que les explications s'arrêtent en si bon chemin. « Il y a eu des engagements et des promesses de faîtes quand j'étais encore tout jeune. J'étais, sans le vouloir, lié par le serment. Mais j'étais un vrai idiot, têtu en plus de ça. On se ressemble plus que tu ne le crois, Abigaël. Le caractère de ton père ne lui est pas venu de nulle part. » lâcha le vieux sorcier avec un grand rire. « J'ai brisé cette promesse, je ne voulais pas me marier par intérêt, mais bien par amour. Et j'ai déclenché une guerre pour ça. Cette vieille folle n'y a pas survécu, et pourtant, crois-moi, elle s'accrochait ! Elle est morte le jour-même de mon mariage avec ta grand-mère, et le lendemain, on se battait déjà avec des membres de la famille Lestrange. ».
Le Poufsouffle avait la bouche entre-ouverte. Lui qui pensait que cette animosité s'étalait sur des siècles. Le plus grand choc fut pour lui d'apprendre que son grand-père était à l'origine de ce conflit. Lui qui d'habitude était si prévenant, si organisé, si prompt à éviter tout conflit ou à les régler dans l'heure ! Il ne l'aurait jamais vu ainsi, à se battre par amour, à mettre en péril l'intégrité de sa famille pour le cœur. Là, le respect d'Abigaël n'en fut que plus grandit, et avec cela, s'accompagna une forme de soulagement. « Donc, si je comprends bien... Tu me soutiens parce que tu as fait la même chose ? C'est un peu... » murmura-t-il avant qu'Alastor ne le reprenne. « Tordu je sais. Mais depuis mon ère, les Velrose ont toujours eu un point d'honneur à défendre la famille. Et cette petite fait partie de la famille. Nous, les Velrose, une fois que nous sommes tombés amoureux, rien ne nous arrête plus. Et je ne laisserai personne me voler un autre de mes proches. Ton oncle voit déjà dans ses relations s'il peut nous trouver des alliés. Ta grand-mère voudra certainement aller voir sa famille, peut-être même les Weasley. J'ai dans l'optique d'aller demander de l'aide aux Potter, tu t'entends bien avec leur dernier, ça devrait passer. Mais ce conflit de famille va s'étendre à bien plus que ça et tu le sais... Ce sera un conflit d'idéaux... D'un côté, Voldemort et ses purs, de l'autre... ».
« Dumbledore. » lâcha Abigaël. Tout était clair, limpide comme de l'eau de roche. Pas étonnant qu'il voulait à ce point rejoindre l'ordre, puis connaissant son grand-père, il devait avoir de bonnes relations avec le directeur de Poudlard. « Nous nous positionnons directement aux côtés de l'Ordre. Il est temps de montrer que la Résistance est là. Les Lestrange seront de son côté à lui, tu le sais déjà. Quant aux parents de ton amie... Je crains qu'il soit impossible de les faire revenir à la raison. Pourtant Greyson était un bon ami de ton père, je ne pensais pas qu'il soit capable de laisser cet accident arriver, surtout pour sa fille. Tu feras d'ailleurs transmettre au frère de la petite Goldstein qu'il est le bienvenu chez moi et qu'il sera informé de nos mouvements. Toi en attendant, barricade toi le temps des vacances, protège ton aimée et reste toujours sur tes gardes. ». Abigaël haussa les sourcils. Toute cette affaire prenait... une tournure inattendue. Néanmoins, il hocha la tête et se releva en même temps qu'Alastor.
Que devait-il faire ensuite ? Prévenir des gens sans doute. Écrire à Iwan, puis à James. Peut-être à Sirius ? Les grandes vacances approchaient en plus de cela... Il pouvait se passer tellement de choses en deux mois qu'il en eut des frissons. Il fallait aussi qu'il recontacte Alecia, pour qu'elle vienne avec son sortilège dont elle lui avait tant parlé. Et Maewan aussi, pour qu'il se batte à ses côtés. Il se sentait désolé de le mêler à tout ça, lui et son petit frère dans le même temps, mais ils ne pourraient se cacher indéfiniment.
Alastor prit congé pratiquement dans la minute, en répétant à Abi de faire attention. Celui-ci se dépêcha de rentrer jusqu'au salon. Cassiopée était toujours là et il soupira de soulagement. Il prit immédiatement du papier, de l'encre et une plume pour commencer ses lettres. Il s'installa sur le sol, assis devant la table basse. Comme il écrivait, il expliqua brièvement la situation à la brune. Le fait que la famille, au nom de son grand-père, le chef actuel de la famille, la prenait sous son aile et qu'elle faisait partie de cette famille, même si elle n'en portait pas le nom, que son frère était le bienvenu et qu'ils ne seraient pas seuls, qu'ils ne couraient aucun danger. Abi jugea qu'il était encore un peu tôt pour lui parler de tous les tenants et les aboutissants du conflit, du pourquoi il avait commencé, et pourquoi les Velrose étaient déjà à ce point impliqués avant que tous deux ne viennent à naître... Visiblement secoué, Abi se contenta d'écrire. Une fois toutes ces émotions passées, il devait penser au bien-être de la brune, et à sa protection, pendant déjà au moins toutes les vacances d'avril. Le premier qui l'approcherait aurait bien du soucis à se faire. Car...
Les Velrose étaient à présent en guerre. Tous les Velrose.